Approvisionnement de bois au privé 101 -L’équité expliquée
L’appel répété, en faveur de la modernisation de la loi sur les terres et les forêts de la Couronne, est l’un des sujets qui suscitent l’intérêt à l’aube de la législature. Le président, Rick Doucet, de la Fédération des propriétaires de lots de boisés du Nouveau-Brunswick (NBFWO), se fait particulièrement entendre dans cet appel. M. Doucet a récemment publié un blogue, rédigé par M. Doucet lui-même, pour que les propriétaires de boisés privés aient un accès équitable aux marchés où ils peuvent vendre leur bois. M. Doucet affirme que le gouvernement, en particulier les ministres actuels et précédents du DER n’ont pas maintenu une disposition de la CLFA relative à l’approvisionnement proportionnel en bois provenant de sources de bois privées. En outre, M. Doucet, et nous ne pouvons que supposer que l’exécutif de la Fédération, affirme également que, faute de respecter l’approvisionnement proportionnel en bois, le Nouveau-Brunswick n’a pas été exclu des tarifs du bois d’œuvre résineux imposés par le département américain du Commerce.
Cette affirmation est convaincante, mais elle nécessite un examen plus profond pour comprendre pourquoi cette action du gouvernement, consistant à ne pas appliquer la disposition, a en réalité sauvé l’industrie du Nouveau-Brunswick d’une fin irrécupérable et a ainsi sauvé le marché auquel les entreprises privées ont pleinement accès. Le fait que la position très publique de la Fédération joue directement dans l’argument de la Coalition américaine du bois d’œuvre, alléguant l’octroi d’une subvention à l’industrie du bois d’œuvre du Nouveau-Brunswick, est toutefois troublant. C’est cet affaiblissement constant du secteur forestier, fondé sur une vision étroite et dépassée de la commercialisation des produits forestiers, qui nuit aux membres de la Fédération, au secteur forestier et aux Néo-Brunswickois dans leur ensemble.
L’approvisionnement en bois privé est récolté à une quantité annuelle d’environ 2 millions de mètres cubes, ce qui représente la quantité récoltée avant la récession de 2005. Environ 20% de l’approvisionnement en bois provient des propriétaires de terrains privés et non 15%, comme l’a déclaré M. Doucet. Au total, environ 48% de l’approvisionnement en bois provient de la Couronne, une légère majorité (52%) provient de petites propriétés privées (20%) et de propriétés industrielles privées (32%). Les allégations du département américain du Commerce ne sont pas fondées et la Fédération ne semble pas consciente du fait que leur soutien à ces allégations est dommageable pour l’ensemble du secteur, y compris pour eux-mêmes.
Pour comprendre pourquoi l’approvisionnement en bois de terrain privé a diminué au cours de la dernière décennie, il faut remonter à la période 2003-2012. Au cours de ces années, le marché du bois d’œuvre a fait rage alors que les prêts à risque dans le marché américain du logement ont surchauffé, cela a provoqué une augmentation de la demande et prix du bois d’œuvre. Les moulins étaient complètement épuisés et les deux parties restaient dans les limites autorisées, l’approvisionnement de bois, provenant de terrains privés, dépassait le 20% les niveaux de récolte durables afin de satisfaire la demande, selon les statistiques sur l’utilisation du bois du DER de l’époque. Ces données contredisent complètement l’affirmation de M. Doucet, qu’il y a « une utilisation excessive des forêts publiques par le secteur privé ».
Ce qui n’a pas été expliqué, c’est la grande récession, qui a fait son apparition en 2006, et qui a affecté le secteur jusqu’en 2012. Les marchés du bois d’œuvre se sont effondrés, la production des scieries a chuté, ce qui a entraîné une augmentation du coût des copeaux pour les usines de pâtes. De plus, quatre usines de pâte à papier ont fermé et plus de la moitié de la capacité de scierie. Le prix du marché de la fibre de bois avait diminué, ce qui ne devrait pas surprendre personne, ainsi que des propriétaires de boisés privés disposés à vendre leur bois à des prix de marché réduits. C’est ainsi que le marché fonctionne.
Cette crise était de grande taille et nécessitait l’intervention du gouvernement pour éviter l’effondrement complet du secteur. La solution consistait à stabiliser le secteur en rachetant des usines sur le point de fermer leurs portes et en redistribuant leur allocation de bois de la couronne. Ce n’était pas du bois supplémentaire. Le bois privé, ayant quitté le marché en réaction aux prix bas, a gonflé la proportion de bois total disponible par la couronne et la pleine propriété. Le volume total des approvisionnements en bois de la Couronne a diminué de 16% entre 2005 et 2009, tandis que le bois privé a nettement augmenté, mais la diminution était volontaire en raison des bas prix de l’époque. Il ne s’agit pas d’une critique de cette décision, car c’est une réaction juste des propriétaires de terrains privés face à la situation dans le marché libre. Les prix pour le bois de la Couronne sont basés sur la juste valeur marchande du bois privé, ce prix correspond à près de 200% de celui de la moyenne pondérée canadienne.
Pour répondre aux affirmations dans le blogue de M. concernant la reconnaissance de la conservation, la réduction d’herbicides et de coupes à blanc par le gouvernement. M. Doucet félicite le public en insinuant que ces pratiques sont rejetées par les propriétaires de terrains boisés privés et ne sont qu’utilisés par les méchants gestionnaires de la grande forêt industrielle, tandis que plusieurs gestionnaires de terrains boisés privés utilisent ces outils pour optimiser les résultats sur leurs terres, y compris la production de bois. C’est la valeur ajoutée dont nous parlons et qui pourrait améliorer la rentabilité et surtout la durabilité pour de nombreux propriétaires de boisés privés. Nous encourageons la Fédération à promouvoir davantage de gestion et nous soutenons leurs efforts pour aller de l’avant.
Il existe des possibilités d’entraide pour obtenir de meilleurs rendements, mais il faut comprendre que l’équité consiste à pouvoir fournir un approvisionnement en bois de manière durable et prévisible, et à ne pas se positionner uniquement par rapport à des prix marginaux. L’approvisionnement en bois privé nécessite un acheteur et un vendeur consentants et qu’une marge de manœuvre permet à l’un ou l’autre de se retirer lorsque la valeur offerte n’est pas présente. L’approvisionnement proportionnel en bois, prévu par la loi, est simplement une forme de gestion de l’offre et cela favorise, inévitablement, toujours le vendeur aux frais de l’acheteur.
Ce n’est pas juste.
Mike Légère, Directeur Exécutif de Forêt NB